Honda CB 750 « Flower Power »

"Flower Power"
L'expression "Flower Power" est née en 1967, lors du "Summer of Love".
Un rassemblement organisé à San Francisco durant lequel les hippies avaient pour consigne de porter des fleurs dans les cheveux ... et de les distribuer autour d'eux - la fleur étant considérée comme le symbole de leur idéologie non violente.
A l'époque, les Etats-Unis sont englués au Vietnam, dans une guerre impossible à gagner.
Au pays, les conflits raciaux sont prêts à exploser à chaque instant, malgré l'adoption du Civil Rights Act, le 2 juillet 1964 - cette loi votée par le Congrès et promulguée par le Président, Lyndon B. Johnson, a pour objet de mettre fin à toute forme de ségrégation, de discrimination reposant sur la race, la couleur, la religion, ou l’origine nationale.
Dans un tel contexte, le "Flower Power" constitue une alternative non-violente, prônée par les leaders de la contre-culture U.S.
Concrètement, les adeptes du "Flower Power" pouvaient tout aussi bien offrir une fleur à un agent de police, pendant une manifestation.
Ou manifester pacifiquement en brandissant des objets bénins : soldats de plomb, épées en caoutchouc, barres chocolatées, instruments, croix ...
Ou encore, glisser une fleur dans le canon du fusil d'un soldat de la Garde Nationale ...

Lors du même rassemblement, le photographe Marc Riboud, de l'agence Magnum, immortalise une jeune manifestante de 17 ans, Jan Rose Kasmir, une fleur de chrysanthème à la main, face à une rangée de soldats de la Garde Nationale, baïonnette au bout du fusil.
Cette photo a été prise par le journaliste Bernie Boston, le 21 octobre 1967, lors de la "marche vers le Pentagone" qui a rassemblé plus de 100 000 personnes, opposées à la guerre du Vietnam.
Le jeune George Edgerly Harris, introduit des fleurs dans le fusil des militaires.

Ce n'est que lorsque j'ai vu l'impact de cette photographie que j'ai réalisé que ce n'était pas seulement une folie momentanée – je défendais quelque chose d'important.
Jan Rose Kasmiri, 2014
Le "Flower Power" résulte en droit fil des manifestations non violentes pour les droits civiques dirigées par Martin Luther King Jr.
Cette idéologie est reprise par la contre-culture florissante des années 1960 qui revendique une existence paisible et agréable, en dehors des normes sociétales dominantes.

A partir du milieu des années 60, la contre-culture hippie se développe à travers une agitation juvénile et une culture de la drogue en plein essor - notamment sur les campus universitaires de Californie.
Elle gagne progressivement l'attention des grands médias nationaux.
Par la suite, le "Flower Power" passera d'un statut d'outil de protestation à celui de mode de vie à part entière.
A travers les images des sit-in et des rassemblements organisés par les leaders de la contre-culture, on prend conscience que, pendant quelques années, au tournant des années 70, à San Francisco, le "Flower Power" a représenté une idéologie largement suivie, puissante, viable ... capable de changer la vie.
D'abord fut le "Bobber"

Il faut remonter aux années 50 pour trouver l'origine du phénomène "Chopper".
Les militaires américains, de retour au pays après la deuxième guerre mondiale, sont peu satisfaits des motos U.S. - Harley et Indian - de l'époque.
En Europe, ils ont découvert les motos britanniques : plus légères, plus élégantes et beaucoup plus amusantes à piloter.
Certains les ont ramenées avec eux.
Ainsi commencent-ils à personnaliser et modifier leurs motos.
Sectionner la partie inférieure du cadre, installer des réservoirs plus grands, des fourches plus longues, de gros pneus type automobile ...
Ajouter des guidons hauts ou rallonger les cadres afin d'augmenter l'espace pour les jambes.
Le style "Bobber" est né.
Ce sera l'ancêtre du "Chopper".
Souhaitant attirer un public jeune dans les salles, les studios d'Hollywood s'emparent du phénomène, pour populariser ce genre nouveau.
En 1953, le film "The Wild One" avec Marlon Brandon, crée le scandale.
Et connaît un grand succès.

Le film s'inspire des affrontements entre bandes de motards s'étant déroulés à Hollister, en 1947 - certains protagonistes faisaient partie d'anciens équipages de bombardiers américains durant la guerre et cherchaient à retrouver des émotions fortes.
Censuré, interdit dans plusieurs pays, le film popularise la moto tout en l'associant aux mauvais garçons, aux voyous, aux rebelles ...
Au grand dam du constructeur Triumph, qui verra néanmoins ses ventes exploser aux U.S.A.
Du "Bobber" au "Chopper"

Dans les années 60, des films comme "Hells Angels On Wheels" de Richard Rush, et "The Glory Stompers" d'Anthony M. Lanza, reprennent l'image du motard marginal, violent et hors-la-loi.
Mais en 1969, un "petit" film indépendant va propulser le phénomène "Chopper" sur l'avant de la scène mondiale.
"Easy Rider", avec Denis Hopper, Peter Fonda, Jack Nicholson, offre une approche nouvelle, en associant contre-culture californienne et moto.
Le film réalisé par Denis Hopper - sur une idée de Peter Fonda - stigmatise la société de consommation et le rêve américain.
Il s'empare du produit "moto" pour le détourner de sa fonction initiale - un objet de consommation - et en faire un symbole de liberté, d'indépendance et d'évasion.
En lien direct avec les roman de Jack Kerouac ("Sur La Route"), le film, présenté au Festival de Cannes 1969, exerce vite une certaine fascination sur la jeunesse.


"Easy Rider" remporte un immense succès et trouve son public parmi la vague hippie, les pionniers de la "Beat Generation" venant également grossir les rangs.
Il devient rapidement un film culte.
Easy Rider est un mélange culturellement explosif de traits particulièrement américains : le cow-boy / hors-la-loi, libre de famille, de propriété ou d'histoire, libre d'explorer des autoroutes sans fin, libre d'exprimer son individualité par la tenue vestimentaire et le choix du transport".

Au début des années 70, le style "Chopper" se professionnalise.
En Californie, les préparateurs se multiplient : fabricants de cadres, peintres, accessoiristes, ...
Le "Chopper" s'élève au rang d'art populaire, typiquement américain.
Un style à part entière.
De moto comme de vie.

Les machines deviennent alors démesurées :
- cadres rigides
- fourches allongées
- guidons immenses
- gros pneus AR
- roues AV minuscules
- mini réservoirs
- selles à double niveau
- sissy-bars
etc ...
Du "Chopper" au "Custom"
Au milieu des années 70, alors que le marché U.S. commence à s'essouffler, les constructeurs japonais créent le style "Custom".
Rebaptisé en France "doux chopper"
Des motos dérivées de modèles existants, inspirées des "Choppers" U.S. mais plus raisonnables et plus utilisables.

Par la suite, le côté extrême du "Chopper" va progressivement s'évaporer :
- les fourches interminables vont revenir à une taille acceptable
- les réservoirs à une contenance décente
- les pneus AR à une dimension raisonnable
Pour les "Bikers" et autres hippies des années 70, la décennie qui s'annonce correspond à une descente aux enfers, type "bad trip".
En Amérique du Nord, le marché de la moto s'effondre littéralement.
Après deux chocs pétroliers successifs, l'entrée en vigueur de nouvelles normes environnementales toujours plus contraignantes, une dévaluation du Dollar U.S. par rapport au Yen japonais et des mesures de protectionnisme promulguées par l'administration Reagan ...
Rien de moins.
Les constructeurs nippons sont contraints de repenser leur production.
Ils s'orientent vers d'autres marchés, notamment européen.
Cela signe la fin de l'ère "Chopper".
Seuls quelques pratiquants marginaux (tout particulièrement en Suède) vont faire perdurer le genre.
Honda CB 750 "Flower Power"

Cette Honda CB 750 "Flower Power" est un hommage à cette parenthèse enchantée, qui démarre en 1968 et s'arrête brutalement en 1981.
La moto ayant servi de base à cette réalisation est une CB 750 K2 de 1973.
Le cadre est d'origine (modifié au niveau de la boucle AR).



Les tubes de fourche sont rallongés.
Un second té inférieur a été soudé en sous-face du té existant, afin d'améliorer la rigidité de l'ensemble.
La roue AV est en 21' de diamètre.



La roue AR est en 16' de diamètre.
Certains accessoires ont été spécifiquement réalisés pour cette moto :
- commandes "avancées"
- selle biplace
- échappements chromés

Le moteur de CB 750 K2 a été peint en noir.
Les carters périphériques ont été polis ou chromés.
Les carters striés sont des pièces "Custom" d'époque.


La peinture du cadre et de la carrosserie, ses détails et sa finition représentent l'un des principaux intérêts de cette moto.
La profusion de chromes met en valeur le travail extrêment soigné du peintre.


Le réservoir n'est pas d'origine.
Qui saura nous dire de quelle moto des années 70 il est issu ?
Cadeau au vainqueur !

Cette Honda CB 750 "Flower Power" a fait partie de l'exposition "Souvenirs, Souvenirs ..." présentée au circuit Paul Ricard, lors des 100 ans du Bol d'Or - 16/18 septembre 2022.

Elle a également fait partie de l'exposition "Les années 70 ... ", au Salon du 2 roues de Lyon 2023.
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